Giacomo Matteotti est issu d’une riche famille de propriétaires
fonciers, il mena à bien des études de droit et milita dans sa
jeunesse au sein du Parti socialiste italien.
En
1919, il fut élu député (dans les conscriptions de Ferrare et
Padoue, comme député de Rovigo) et resta fidèle au Parti
socialiste quand celui-ci se scinda pour donner naissance au
Parti
communiste italien en
1922. Durant
les élections qui virent consacrer la victoire fasciste (1922),
il dénonça les méthodes, violentes et malhonnêtes, de ces
derniers, il était alors président du Conseil. Le
30
mai 1924, il réclama
l’annulation des élections et promit d’apporter de
nouvelles preuves des malversations fascistes durant les élections.
Le 10 juin,
il sera enlevé par des miliciens fascistes et poignardé à
mort ; son cadavre fut retrouvé 2 mois plus tard, le 15 août, à
la Quartarella, à 25 kilomètres
de la capitale.
Un témoin ayant relevé
l’immatriculation de la voiture permet de retrouver les
assassins ; en tout ce sont 5 partisans fascistes qui sont
en cause, leur chef se nommait Amerigo
Dumini.
Le
Parti fasciste fut ébranlé par la vive émotion qui gagna le
pays, et l’étranger, à la découverte du crime ; on
parlait désormais de l’ « affaire
Matteotti », une affaire qui
mit sérieusement en péril le pouvoir de
Mussolini.
Le
chef du Parti fasciste se retrouvait isolé, abandonné par bon
nombre de ses amis, il décida d’exclure du gouvernement les
éléments les plus extrémistes du Parti, de faire arrêter les
auteurs du crime et de promettre leur jugement. Cependant
Mussolini réussit à se sortir habilement de ce mauvais coup,
aidé en cela par les erreurs d’une opposition divisée. En
effet, le 13 juin 1924,
127 députés opposés au régime décidèrent de quitter le
Parlement en se «retirant
sur l’Aventin»,
cette manœuvre maladroite les priva d’une tribune et laissa
les mains-libres aux fascistes. Le 3 janvier 1925, Mussolini se
décida à « assumer
la responsabilité politique, morale et historique de tout ce
qui s’est passé »
et à faire, devant les députés, l’annonce de la dictature.
Le
rôle du roi,
Victor-Emmanuel III,
qui est l’arbitre de la situation à ce moment là, se
retranche derrière la Constitution, qui lui interdisait
d’intervenir directement, et refuse de prendre connaissances
des documents accusant les fascistes.
Mussolini reprit sans difficultés le contrôle de la situation.
En janvier 1926
s’ouvrit, à Chieti, le procès
des fascistes de Dumini, défendus par
Farinacci,
secrétaire général du Parti fasciste. Deux des assassins
furent absous; les trois autres, condamnés à six ans de
prison, furent amnistiés au bout de deux ans de détention.
La
question qui reste patente est de savoir dans quelle mesure
Mussolini fut au courant de l’exécution de Matteotti, en était-il
le commanditaire ? De Bono,
le chef de la police, était-il lui aussi au courant des
agissements de ce commando fasciste ? Il semble que l’on
puisse dire aujourd’hui que l’un comme l’autre furent au
courant de l’existence et des agissements du commando, plus même
puisque, selon Pierre Milza,
ils travaillaient sous la direction du général De Bono. Mais
par contre rien ne prouve que l’un ou l’autre fut
l’instigateur de l’enlèvement ; Mussolini nia toujours
avoir ordonné l’exécution du député et rejeta la
responsabilité sur certains de ses collaborateurs ; il fit
valoir comme preuve qu’il aida pendant des années la veuve de
Matteotti à financer les études de ses enfants.
Pourtant
il est possible d’affirmer qu’il existait un « complot »
destiné à cacher les affaires de
« pots-de-vin » auxquels
furent mêlées Mussolini et quelques autres dirigeants
fascistes ( par exemple Marinelli,
secrétaire administratif du parti ;
Filippelli,
directeur du Corriere italiano, utilisé comme intermédiaire
entre les fascistes et le monde économique, et Dumini) entre
1921 et 1924 ; Matteotti était au courant de ces affaires
et il est indéniable que les milieux fascistes redoutaient que
le scandale soit révélé par les socialistes.
Les
assassins de Matteotti ne furent rejugés qu’en
1947
(seul 3 d’entre eux, dont Dumini,
étaient encore en vie), ils seront condamnés au bagne à vie.